Le Gypsophile

Dans la pâle lumière
D'un après-midi d'hiver
Le Gypsophile
Immobile
Se tient tranquille
Dans son écrin
Vert chlorophylle
Et contemple le jardin
De ses mille petits yeux
Qui forment un beau camaïeu.

— Gérard Miro

Le grand chêne

Le grand chêne tend vers le ciel ses grands bras décharnés dans une supplique sans espoir. Le grand chêne se meurt.
Une gangue épaisse, vivante, impitoyable l’étreint et l’étouffe.
Des chants d’oiseaux nombreux, joyeux s’échappent de l’épais matelas vert luisant.
Le grand chêne se meurt accompagné d’un requiem continu, heureux.

— Liliane Faucher

Le retour du soleil

Aquarelle Gérard Miro
Pour le retour du Soleil honorer,
le Zephir, l'air serein lui apareille,
et du sommeil l'eau et la terre esveille,
qui les gardoit l'une de murmurer,

en dous coulant, l'autre de se parer
de mainte fleur de couleur nompareille.
Ja les oiseaux es arbres font merveille,
et aux passants font l'ennui modérer ;

les Nynfes ja en mile jeus s'esbatent
au cler de Lune, et dansans l'herbe abatent.
Veus tu Zephir de ton heur me donner,

et que par toy toute me renouvelle ?
Fay mon Soleil devers moy retourner,
et tu verras s'il ne me rend plus belle.

— Louise Labé - œuvres poétiques - Sonnet XV

Rêves d'automne

Aquarelle Gérard Miro
Salut ! bois couronnés d'un reste de verdure !
Feuillages jaunissants sur les gazons épars !
Salut, derniers beaux jours ! Le deuil de la nature
Convient à la douleur et plaît à mes regards !

Je suis d'un pas rêveur le sentier solitaire;
J'aime à revoir encor, pour la dernière fois,
Ce soleil pâlissant, dont la faible lumière
Perce à peine à mes pieds l'obscurité des bois !
... 

— Alphonse de Lamartine, Rêves d'automne

La pente de la rêverie

Aquarelle Gérard Miro
Alors, dans mon esprit, je vis autour de moi
Mes amis, non confus, mais tels que je les vois
Quand ils viennent le soir, troupe grave et fidèle,
Vous avec vos pinceaux dont la pointe étincelle,
Vous, laissant échapper vos vers au vol ardent,
Et nous tous écoutant en cercle, ou regardant,
Ils étaient bien là tous, je voyais leurs visages,
Tous, même les absents qui font de longs voyages...

— Victor Hugo - La pente de la rêverie (extrait)

Aquarelle Gérard Miro
Adieu, passé, songe rapide
Qu’anéantit chaque matin !
Adieu, longue ivresse homicide
Des Amours et de leur festin,
Quel que soit l’aveugle qui guide
Ce monde, vieillard enfantin !
Adieu, grands mots remplis de vide,
Hasard, Providence ou Destin !
Fatigué dans ma course aride
De gravir contre l’incertain,
Désabusé comme Candide
Et plus tolérant que Martin,
Cet asile est ma Propontide :
J’y cultive en paix mon jardin.

— Beaumarchais (1732-1799)
Inscription placée dans son jardin, au fond d’un bosquet.

La guerre des bleus et des marrons

Les bleus étaient courageux
Les marrons n'étaient pas des poltrons
Ils se firent la guerre
Mais à la guerre, tout le monde perd
Si bien
Qu'à la fin
Les bleus avaient reçu des marrons
Et les marrons étaient couverts de bleus
Ils comprirent alors
Qu'ils avaient eu tort
Qu'il n'y a pas de couleur
Aux autres supérieure
Et que c'est en étant unis
Qu'on trouve l'harmonie.

— Gérard Miro

Ma huppe

Venue d'Afrique
Fière et magnifique
Cri rauque, chant étrange
Huppe relevée à l'humeur
Bec tel un sabre, prêt à l'usage
Vêtue de motifs africains
Tellement exotique dans un jardin
habité de moineaux, merles et mésanges
Herbes sèches et plantes du Sud lui
donnent un écrin apprécié
Nous, nous sommes sous le charme,
l'admirons et l'espérons chaque année.

— Liliane Faucher

Petit matin

Le soleil se glisse entre les grands pins
Doucement, tendrement, ses rayons réchauffent
les buissons puis les fougères et enfin les mousses
L'air sent bon la végétation qui s'éveille
La mousse dorée, épaisse, encore humide accueille
avec douceur nos pas
Quelques orchidées sèchent lentement et n'oublient pas
de répandre quelques graines
Des pommes de pin posent ça et là
Les oiseaux commencent doucement un chant mélodieux
Harmonie parfaite de la Nature, magie du moment, bonheur précieux.

— Liliane Faucher


Rêve de jardin

Herbes folles
Trémière sentinelle
Porte close, rêve de jardin
Pêle-mêle de feuilles, fruits et corolles joyeuses
Chat bercé par la mélodie des oiseaux
Jardinier affairé de mille gestes nourriciers
Lézards verts parés de magnifiques turquoises
Fontaine glougloutant une fraicheur apaisante
Papillons alourdis de pollen
Caresse tendre d'une brise marine
Porte refermée sur un rêve de jardin.

— Liliane Faucher

Le kiosque à musique

C'est dimanche
Quelle chance !
Dans le kiosque à musique
L'orchestre joue
Les musiciens s'appliquent
Les enfants font les fous
Un couple danse
En cadence
Les promeneurs s'arrêtent
Intrigués par cette fête
Puis cherchent une chaise
Bien installés, ils se mettent à l'aise
Pour écouter les airs d'antan
Que fredonnaient leurs parents
Et quand vient le refrain
Tous applaudissent des deux mains.

— Gérard Miro

Vol d'oiseaux migrateurs

Une espèce de danse au carrefour des cieux
Et, planant en silence, en leur envol gracieux,
Regardez-les signer, dessiner dans l'espace
Les lignes d'une lettre, un rêve qui s'efface.

Venant d'on ne sait où, allant dans un ailleurs,
Ils quittent nos hivers, les oiseaux migrateurs
Et crient leur liberté, sans prison ni barrière,
En leurs pépiements d'école buissonnière.

Nous, nous ne bougeons pas, au gré de nos saisons
Eux nous laissent le froid, blottis en nos maisons,
Nous cherchons dans la vie à laisser une trace,
Eux, ils vont de l'avant et nous laissent sur place.
… 

— Charly Lellouche (extrait)

Promenade à vélo

Dessin My
Me promener à vélo,
Le matin tôt.
Respirer l'air frais
Dès l'aube me rend gaie.

Moments de liberté,
Parmi les fleurs rosées.
Roulant à toute allure,
Le vent en pleine figure.

J'ai ce sentiment infini
D'être en paix avec la vie
Et surtout avec moi-même,
Oubliant toutes mes peines.

Grâce au chant des oiseaux,
A l'odeur des coquelicots

Enfin le temps de regarder,
Enfin le temps de respirer,

Enfin le temps de rire,
Enfin le temps de vivre.

— Poème de Florence Levardon

Printemps

Gérard Miro
Voici donc les longs jours, lumière, amour, délire !
Voici le printemps ! mars, avril au doux sourire,
Mai fleuri, juin brûlant, tous les beaux mois amis !
Les peupliers, au bord des fleuves endormis,
Se courbent mollement comme de grandes palmes ;
L'oiseau palpite au fond des bois tièdes et calmes ;
Il semble que tout rit, et que les arbres verts
Sont joyeux d'être ensemble et se disent des vers.
Le jour naît couronné d'une aube fraîche et tendre ;
Le soir est plein d'amour; la nuit, on croit entendre,
A travers l'ombre immense et sous le ciel béni,
Quelque chose d'heureux chanter dans l'infini.

— Victor Hugo (Toute la lyre)

Le vent


Dessin My Miro
Les anciens en avaient fait un Dieu : Éole
Capable du pire comme du meilleur
Le vent fait s'envoler les chapeaux
Fuir les moineaux
Annonce la pluie
Retourne les parapluies
Dépouille les arbres à l'automne
Fait claquer les portes
Provoque des bruits de toutes sortes.
Le vent est parfois un défi
Mais qui disperse les confettis
Pour la joie des enfants ?
Fait tourner les ailes des moulins ?
Fait avancer les voiliers ?
Sèche les vêtements étendus dans la cour ?
Dans ces cas-là, on est bien content
Et on lui dit « merci », au vent.

— Gérard Miro

Confettis

Photo gérard Miro
Si tu dis oui,
Confetti.
Si tu dis non,
Cotillon.
Si tu dis oui,
Accroupi.
Si tu dis non,
Tourne en rond.
Si tu ne dis
Ni oui, ni non,
Tourne en rond,
Accroupi.
Cotillons et confettis.

— Comptine

Retard coupable

J'étais arrivé très en retard
à mon rendez-vous.
Il faisait un froid de canard.
Malgré ce froid et cette neige,
elle m'avait attendu, c'est fou !
Honteux et désespéré
j'allais éclater en sanglots
lorsque derrière moi,
j'entendis sa voix !
Lassée de m'attendre,
elle avait construit cette statue
de glace à son image
puis s'était cachée à proximité
pour surgir au bon moment
et me faire peur.
Ah, la bonne farce !

— Gérard Miro