Page de comptes


« Deux et deux quatre
quatre et quatre huit
huit et huit font seize... »
Répétez ! dit le compteur 84

« Deux et deux quatre
quatre et quatre huit
huit et huit font seize. »
...

Mais voilà le condor
qui passe dans le ciel
le compteur 83 le voit
l’entend et l’appelle :

« Sauve-moi
joue avec moi
oiseau ! »

Alors le condor descend
Il prend son élan
et arrache le compteur
avec ses pattes.

Le compteur ne compte plus
Il s'est arrêté à seize
Seize ou huit qu'importe
Tout ça ne compte plus du tout maintenant.

Et le compteur conte
Il commence à imaginer
Toutes les histoires rigolotes,
Belles ou à pleurer.

Les histoires de ces familles
Qu'ils a croisées, qu'il a comptées
Des gens plus ou moins fortunés,
Qu'il n'a jamais rencontrés.

Alors il se met à chanter
et tous les enfants
entendent la musique
et huit et huit s'en vont.

Les persiennes redeviennent arbres
Les compteurs redeviennent oiseau,
Les fenêtres redeviennent sable,
Et le condor repart très haut.


Eleonore Sur, Hommage à Prévert