La révolte des Bisounours


Au royaume des doudous, le bleu côtoie le rose :
délicates harmonies de babies sans le blues.
La lune et les étoiles redorent même le ciel.
La dentelle du coussin se fronce de plaisir.
Chiffons, festons, croquets,
Vichy, Liberty, et fleurettes
susurrent à l’oreille d’Alice,
qu’au pays des Merveilles,
elle peut, si elle le veut,
épouser le Lapin au nez brodé de rouge,
avec pour seuls témoins
les poupons et Nounours en habits de peluches.

Mais tout ce petit monde, frappé d’obsolescence,
en manque de câlins, de considération,
boudé par la mignonne en route d’adolescence,
programme sa révolte, entre en révolution.
Convoqué pour statuer, le clown impertinent
s’en vient crever d’un coup la bulle de l’enfance.
Excite les doléances,  incite à la vengeance.
C’est la guerre des nerfs entre les doudous sages :
les réclamations fusent,
les frustrations claquent,
les jalousies lacèrent les chiffons.
Le monde des Bisounours explose dans la chambre.

Alors, d’autorité et sans un jugement,
la jeune fille-fleur enfouit tous ses trésors
dans la malle à souv’nirs et impertinemment,
part explorer le monde : un monde sans Bisounours !

— Liliane Fauriac